Batterie virtuelle : impact réel, limites et enjeux futurs
Cet article est la suite de “Batterie virtuelle solaire : définition, fonctionnement et limites techniques”, dans lequel on a défini ce qu’est une batterie virtuelle et comment elle fonctionne. Ici, on va regarder un peu plus en détail l’impact d’une batterie virtuelle pour la transition énergétique, et comment ce modèle peut être impacté par la fin de l’ARENH en décembre 2025.
L’illusion de l’équilibrage réseau
Pourquoi la batterie virtuelle ne soutient pas le réseau
Malgré son nom, une batterie virtuelle ne stocke pas l’électricité. Lorsqu’un particulier injecte un surplus solaire dans le réseau, celui-ci est instantanément absorbé… par n’importe quel consommateur connecté. Ce kilowattheure n’est pas stocké, il est consommé en temps réel. La « batterie » virtuelle, elle, se contente d’enregistrer ce surplus dans une base de données, pour en créditer l’utilisateur plus tard.
À aucun moment il n’y a équilibrage différé entre production et consommation. Contrairement à une vraie batterie domestique, qui agit comme un buffer local et améliore l'autoconsommation réelle, la batterie virtuelle ne soulage pas le réseau en période de pointe, ni ne lisse les appels de puissance. C’est une opération purement comptable, orchestrée par le fournisseur.
Risques d’incohérence entre production, injection et demande locale
Ce décalage entre ce que le client pense faire (stocker son énergie) et ce qui se passe réellement (injecter et consommer à des moments potentiellement opposés) peut introduire des déséquilibres à l’échelle locale. Imaginons un quartier résidentiel avec une forte production PV à midi : tous les foyers injectent, peu consomment. Le réseau doit alors évacuer cet excédent, parfois jusqu’à saturation.
Si ces mêmes foyers "récupèrent" leur énergie virtuelle à 20h (via leur fournisseur), la demande globale augmente… sans lien avec la production locale. La batterie virtuelle aggrave donc potentiellement les pics, au lieu de les lisser : la batterie rend moins intéressant de consommer son électricité au bon moment, et donc incite moins les comportements vertueux pour le réseau.
Quels impacts avec la fin de l’Arenh ?
Fin d’un modèle économique favorable aux fournisseurs alternatifs
Le dispositif Arenh (Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique) permettait jusqu’ici aux fournisseurs alternatifs d’acheter une partie de l’électricité à prix fixe (42€/MWh). C’est ce mécanisme qui leur permettait de proposer des batteries virtuelles bon marché, en valorisant le surplus injecté à un prix artificiellement avantageux.
Plus concrètement, un consommateur qui “stocke” de l’électricité va en fait produire pour le compte du fournisseur cette électricité. Le fournisseur doit ensuite s’assurer que, pour l’ensemble de ses clients, la consommation est égale à la production + à l’électricité qu’il a achetée.
Sauf que l’électricité “stockée” le midi l’été vaut très peu cher sur les marchés : elle est abondante. En revanche, l’électricité que le fournisseur va devoir fournir au consommateur qui “décharge” sa batterie en soirée l’hiver est moins abondante, et coûte beaucoup plus cher. Pour s’y retrouver économiquement, le fournisseur facture un abonnement, et/ou des frais d’utilisation, et compte aussi sur l’électricité peu chère de l’ARENH pour ne pas payer trop cher l’électricité que demandent ses clients l’hiver.
Mais ce système prend fin en 2025. Sans cet accès bon marché, le coût réel de la fourniture d’électricité augmente — rendant le modèle de la batterie virtuelle beaucoup moins rentable pour les fournisseurs. Et donc laisse penser que ce modèle va évoluer, pour être moins avantageux pour les particuliers.
Repenser l’intérêt des batteries virtuelles dans un marché dérégulé
Dans un contexte post-Arenh, les fournisseurs devront acheter toute leur électricité au prix de marché. Cela pourrait se traduire par :
Une baisse de la valorisation des surplus injectés ;
Une hausse du prix de rachat virtuel pour les clients ;
Ou une disparition progressive de ces offres si elles ne sont plus compétitives.
Autrement dit, le modèle devient instable et incertain, rendant les promesses marketing des batteries virtuelles beaucoup moins convaincantes.
Vers de nouvelles stratégies d’autoconsommation ?
La fin de l’Arenh pourrait marquer un tournant vers des stratégies d’autoconsommation réellement locales. Face à la volatilité du marché, de plus en plus de particuliers envisageront :
L’installation de batteries physiques (avec baisse des coûts attendue) ;
Le pilotage intelligent des appareils (chauffe-eau, VE, PAC) pour consommer en temps réel le surplus ; (👋 coucou notre Délesteur Solaire)
Ou le partage d’énergie local (autoconsommation collective) pour avoir une motivation économique à consommer au bon moment.
Dans ce contexte, la batterie virtuelle risque de devenir une solution transitoire, dépassée par des alternatives plus techniques et efficaces.
Faut-il recommander une batterie virtuelle à ses clients ?
Pour quels profils c’est (parfois) pertinent
Bien sûr, ça dépend de votre installation, et en particulier de votre surplus. Voilà quelques exemples :
On prend plusieurs hypothèses ici :
100% de l’électricité stockée est autoconsommée. C’est une hypothèse très incertaine : si vous avez une petite batterie, une partie de votre surplus de l’été dépassera sûrement la capacité de votre batterie, et sera donc récupéré gratuitement par votre fournisseur.
on consomme l’électricité en heures pleines (c’est l’hypothèse la plus favorable pour la batterie virtuelle)
Ce sont des approximations, mais ça vous donne une idée des calculs à faire pour décider si c’est un système réellement intéressant pour vous. Un point important à regarder est la taille de la batterie nécessaire : c’est le paramètre qui va déterminer à la fois la partie de l’électricité produite que vous pouvez stocker, et le coût de votre abonnement.
Alternatives plus vertueuses pour l’autoconsommation réelle
Si le but est de maximiser l’autoconsommation technique et locale, mieux vaut orienter ses clients vers :
Des solutions de pilotage intelligent, routeurs et optimiseurs d’autoconsommation (👋 re-coucou notre Délesteur Solaire)
L’intégration de batteries physiques, même si c’est une solution qui peut être couteuse (économiquement et écologiquement)
Ces options permettent un vrai impact sur le réseau, réduisent la facture, et sécurisent l’installation sur le long terme.
Ce que doivent savoir les installateurs avant de la proposer
Avant de proposer une batterie virtuelle, il est crucial de :
Comprendre le mécanisme contractuel (crédit/consommation, valorisation, durée…) ;
Expliquer clairement à son client qu’il ne s’agit pas d’un stockage physique ;
Vérifier les conditions de l’offre (durée de validité des kWh stockés, éventuels frais, etc.) ;
Et anticiper les risques liés à l’évolution réglementaire (fin de l’Arenh, taxation possible, etc.).
Le rôle de l’installateur, ici, est avant tout pédagogique et stratégique.
FAQ : ce que cherchent vraiment les utilisateurs
La batterie virtuelle est-elle vraiment utile pour l’autoconsommation ?
Non, pas au sens technique. Elle ne permet pas de consommer son électricité solaire à un autre moment. Elle offre une compensation comptable sur la facture, mais n’augmente pas l’autoconsommation réelle.
Quelle est la différence entre une batterie physique et une batterie virtuelle ?
Batterie physique : stocke réellement l’électricité sur site (dans un accumulateur), permet de la consommer plus tard sans repasser par le réseau.
Batterie virtuelle : enregistre les surplus injectés et les compense plus tard sur la facture. Aucune électricité n’est stockée.
Conclusion
La batterie virtuelle est un outil marketing malin, qui peut rendre l’autoconsommation plus rentable à court terme… mais qui n’est pas une solution de stockage. Elle n’a aucun effet bénéfique sur le réseau, ne permet pas de lisser la production locale, et repose sur un modèle économique fragile, menacé par la fin de l’Arenh.
Pour les installateurs, il est essentiel d’évaluer cas par cas la pertinence de cette option, en privilégiant toujours des solutions techniquement vertueuses et durables pour leurs clients.
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